Un fameux cocktail
Une des merveilles de notre époque, c’est le cocktail de rencontres qu’elle nous permet de faire. Fini le temps des notaires fils de notaires qui ne fréquentaient que des avocats fils d’avocats ou des médecins fils de médecins… Qui mariaient leurs enfants sans aller plus loin que les limites de la ville par des mariages que l’on disait sournoisement d’inclination mais qui avaient été soigneusement canalisés. Qui considéraient tout qui n’avait pas leurs habitudes vestimentaires, éducatives et autres comme faisant partie « des autres »… Les autres étaient une multitude, et les gens comme il faut n’étaient qu’une poignée…
Ma cousine Françoise et moi passons des heures à rire de soulagement au souvenir des jeunes gens boutonneux aux mains moites, le verbe faussement assuré et pâles comme des pierres de lune que nos mères et tantes cherchaient à capturer pour nous. On nous vantait leur bonne éducation et avenir d’une certitude effrayante. Heureusement, elles ne furent pas trop déterminées avec nous, mais nous avons des connaissances qui n’ont pas échappé à leur sort.
Quel bonheur que de travailler avec des gens que l’on n’aurait jamais approchés autrement, et de se laisser surprendre par la richesse des différences, la gentillesse bondissant de tant de manières, le courage dans la vie quotidienne, les histoires d’exodes, de guerres, de vies de fatigues, de grandes décisions, de coutumes qui nous surprennent et nous apprennent que le monde est vaste et que les gens comme il faut revêtent bien des aspects.
J’ai des amis et amies de tous les milieux, de bien des pays et opinions. Fidèle par nature, ces amis le sont depuis parfois la vie entière, et nous nous sommes accompagné/es dans toutes les débâcles et conquêtes de nos vies. Nous avons bien et mal agi, et souvent nos qualités n’ont pu avoir le dessus sur des aspects de nous que nous aurions aimé garder secrets. Mais la constante, c’est que nous nous sommes tous et toutes enrichis à notre contact, que le monde est devenu moins étriqué et solennel, que le rire y a retenti, que nos chagrins ont été soulevés et nos joies partagées. Par tous ces gens comme il faut que je connais et qui viennent de partout, de toutes les classes sociales, de tous les passés, de toutes les manières de table et goûts vestimentaires, opinions et certitudes.
C’est un fameux cocktail !