Ils ont lu "Les romanichels" et...

 

Les cahiers de la semaine (mensuel), 14 mai 2009

 

Luc Beyer de Ryke m’a fait l’honneur de présenter mon livre dans ce magazine anversois et francophone. Il parle du nombre de personnages qui l’a un peu décontenancé au début, ainsi que le chevauchement des époques, mais, dit-il « au fil des pages et du récit, la saga prend corps, les êtres et les choses prennent place, s’ordonnent, le temps s’écoule, les générations se succèdent. Le lecteur alors est avide de connaître la suite. Il rie, il pleure, il vagabonde avec les personnages. En un mot comme en cent, ils se laisse emporter. C’est le chemin de vie d’une famille, de ses proches, de tous ceux qui, de près ou de loin, participent à son univers. » Il continue avec ceci : « Si je voulais abuser des références illustres dans le domaine des lettres, je dirais qu’on retrouve chez Les romanichels le côté Mallarmé et ses misérables petits secrets de famille, le côté proustien des vanités mondaines et l’allure du roman picaresque. » Et puis, remarque bien flatteuse pour moi venant de Mr Beyer de Ryke, il affirme « … je me contenterai de relever qu’Edmée De Xhavée a du style et un style. »

Voir aussi sur critiques libres. Et ajoutez-y la vôtre si le coeur vous en dit!

En mars 2009, c’était Albert Moxhet qui avait fait la critique de ce livre sur le journal verviétois « Le jour ». Albert est une personnalité de notre terroir – et d’ailleurs -, mais sur nos terres verviétoises, tout le monde, absolument tout le monde le connaît. Le loup blanc, c’est lui. Et sa présentation des romanichels soulignait, bien entendu, les aspects locaux qu’il n’avait pas manqué de remarquer. « Quatre générations de la haute bourgeoisie verviétoise du XXè siècle dynamitées par une conversation » met-il en titre. Puis il me présente et …« elle vient de publier chez Chloé des lys un roman, Les romanichels, qui décape à haute pression le mode de vie d’une certaine société qui tint le haut pavé à Verviers durant le XXè siècle, c’est-à-dire à l’époque de la prospérité de l’industrie lainière puis de sa décadence. » Plus loin, il termine : « L’humour et le drame s’y conjuguent par la grâce d’une plume souple et lucide qui ne craint ni la passion ni l’apaisement. Edmée De Xhavée a donné à son oeuvre un titre qui se rapporte certes à un épisode italien du récit, mais aussi et surtout à l’élément inconvenant que constituent la mère d’Olivia et quelques-uns de ses amis et amies pour le milieu très conventionnel et « bien comme il faut » dont ils sont issus.

Christian Van Moer, Février 2009 - Ne croyez pas que vous allez assister à un banal jeu de vases communicants, la mémoire de l’une se vidant pour remplir celle de l’autre, nenni ! l’histoire qu’Edmée De Xhavée nous offre est bien plus complexe, plus subtile que ça.
On pourrait songer d’abord tout naturellement à A la recherche du temps perdu. On retrouve même la Madeleine (pardon pour cette sortie douteuse). La déliquescence de la société décrite par Proust se poursuit chez Edmée. Hobereaux et grands bourgeois s’unissent jusque dans la vilenie pour faire obstacle à ce qu’ils considèrent comme l’ultime flétrissure, au mélange de leur progéniture avec celle des classes sociales qu’ils jugent inférieures, sinon intouchables, refusant obstinément de s’adapter à l’évolution des mœurs et tout particulièrement à la libération de la femme.
Des émules des Guermantes, des jeunes filles en fleurs, une prisonnière qui finit par disparaître, avant l’apaisement du temps retrouvé ?... Le souvenir de Proust nous égare.
On pourrait penser aussi à Flaubert, avec ces Emma Bovary, ces privilégiées désœuvrées qui tentent vainement de remplir le vide de leur cœur et de leur corps dans les bras d’amants incapables de les combler. Ou à Bazin encore, quand nous voyons ces femmes mal mariées devenir des mères indignes et des épouses pas loin de reléguer leurs maris au rang de bourdons, le despotisme matriarcal émerge. Mais là encore, on s’égare.

Alors, me direz-vous, les clés pour lire cette œuvre si riche, si subtile ?

Elles sont au nombre de deux :
- lisez Les Romanichels comme de savoureuses scènes de la vie familiale ;
- lisez surtout Les Romanichels comme un merveilleux roman d’amour.

L’amour ? Tel que nous le dépeignent Flaubert, Proust ou Bazin ? « … où est l’amour dans tout ça… L’amour qui est le centre de tous les films, poèmes, aspirations, chansons, et qui n’a pas l’air d’exister ! Qui sait si au lieu de Dieu, ce n’était pas l’amour, l’opium du peuple ? »
Non.
« …dans Les Mille et une nuits, il y a une phrase magnifique qui dit que seul l’amour subsiste dans l’angle du tombeau ! Aimer, c’est ce qui nous fait survivre »
Oui, vous allez lire une histoire d’amour. Mais en pièces détachées, présentée comme un puzzle à reconstituer. Peu à peu, les bribes mémorielles, les souvenirs mémorables vont s’assembler. Comme les pièces d’un puzzle qui s’agencent à partir des bords du cadre vers le centre, où les pièces maîtresses – celles qui gardent longtemps avant de le révéler complètement le secret familial – vont finir par trouver soudainement, inévitablement leur place. Car secret il y a, dans cette famille, un secret tout à la fois sordide et sublime, particulièrement bien gardé… jusqu’à l’intrusion d’Alzheimer… Ne comptez pas sur moi pour que je vende la mèche.
« Je n’ai pas été une bonne mère… », commence par dire Suzanne à Olivia. Et c’est parti pour 250 pages. Pas d’un récit linéaire, non ; comme si les mémoires brusquement dégoupillées dispersaient leurs éclats tous azimuts, atteignant tant la mère que la fille, les écorchant, les blessant, mais leur donnant également les coups de lancette salutaires, les rapprochant, les rassérénant… tant l’épanchement est une douce médecine.

Scènes de la vie familiale.
Entrez dans le monde d’Edmée et délectez-vous : l’auteur a le don d’immerger totalement son lecteur dans les décors les plus divers ( ah ! Belgique chérie, Provence, Italia… ) comme dans les atmosphères les plus variées ( gamineries, bals, voyages, scènes de ménage, coups bas…).
Certaines de ses cartes postales ont conservé un cachet nostalgique, et c’est charmant.
Mais elle excelle surtout dans la peinture des sentiments, de leurs méandres, de leur vernis social qu’il faut gratter et gratter encore pour faire apparaître les personnages sans fard, nus, dans toute leur laideur souvent, dans toute leur beauté parfois. Les convenances, la bienséance, les règles anachroniques de leur caste les ont tellement bardés d’apparence trompeuse ! Car « chez ces gens-là », comme le chante Jacques Brel, « on triche ». Toutefois ces sentiments ne sont pas toujours monolithiques, ils peuvent évoluer en bien comme en mal.
Mais la simplicité, la sincérité, le cœur sur la main, le cocon familial protecteur, le respect de l’autre ou le dévouement désintéressé, c’est chez les humbles qu’on les découvrira ; chez ceux qui ont su conserver « cette incroyable masse d’amour humain, de grâces rendues comme au temps du paganisme à la vie, la nourriture, le bon temps passé à s’aimer… » Chez ceux qui comme les romanichels sont si souvent méprisés et rejetés.

Les Romanichels.
Les authentiques Romanichels n’apparaissent que dans l’avant-dernier chapitre. Un chapitre troublant, qui mêle réalité et fantastique, et qui élargit singulièrement le sens de « marginaux incapables de se fixer » que le titre pouvait suggérer.

La technique narrative.
Olivia, la narratrice, ne guide pas le lecteur en racontant son histoire sur un mode linéaire. Elle l’égare en parlant tantôt à la première personne, tantôt à la troisième, souvent – sans crier gare – en laissant carrément ses personnages la relayer. Mais cette technique un peu déconcertante « de l’éclatement » met ici avec bonheur l’expression en concordance avec le fond : ne perdons pas de vue après tout que ces souvenirs ressurgissent du passé en en bousculant et réveillant d’autres au hasard. Les associations sensorielles et mémorielles ressuscitent événements et sentiments, pêle-mêle. Au lecteur de récolter et de recoller soigneusement les éclats de cristal éparpillés par la mémoire, de reconstituer fidèlement le puzzle.
Dissimulé, l’ordre est bien présent néanmoins : malgré Alzheimer, Suzanne sait parfaitement à quel moment et comment il importe de dire les choses essentielles. Et Olivia commence et termine son récit à la première personne.

L’écriture.
Le vocabulaire d’Edmée est riche, pittoresque et juste. Riche sans être pédant, pittoresque sans trop paraître étranger, juste sans être didactique. Le monde décrit par l’auteur a bel et bien existé ; nul besoin d’effets de style tourmentés, voire tordus, pour le faire revivre, nous le rendre crédible.
La phrase, de facture classique est souple, aérée. Pas de discours pompeux, pas d’envolée emphatique, pas de construction lourde. Elle peut être complexe, pour décrire un sentiment complexe ou un émerveillement, jamais elle n’est pesante ou bancale.

En guise de conclusion, je vous laisse méditer cette réflexion de Gisèle Halimi, interviewée cette semaine au JT de la RTBF1 :
« L’instinct maternel n’existe pas, mais l’amour maternel peut exister ! »

Bravo Edmée ! Je l’ai longtemps attendu, ton roman, mais il ne m’a pas déçu.

J’ai détesté : les chiffres quasi invisibles qui renvoient aux notes en bas de page.
J’ai adoré : le sourire de Gelsomina.

Cathy Bonte, Février 2009 -  Je viens d’en terminer la lecture, et je tenais à vous faire partager mes sentiments.

Je l’ai aimé, bien sûr, comment pouvait-il en être autrement ?  Elle a ce style qui la caractérise, fluide et magnanime dans les détails. Ses descriptions nous font voyager, nous transportent dans son univers. J’ai « vu » les scènes qu’elle a décrites, j’ai aimé les détails de décoration, d’habillement, l’ambiance de plusieurs époques. J’ai partagé l’émotion des héroïnes. J’ai aimé l’histoire ; une histoire qui m’a fait réfléchir à ma propre vie. Et ça, je trouve que c’est toujours très enrichissant, ce genre de roman.  Quand on le ferme, il ne reste pas « bêtement » sur la table, il continue à vivre encore un moment dans notre esprit, nous obligeant à nous poser des questions, sur son histoire et sur la nôtre …

 

J’ai regretté le manque de ponctuation, parfois. Mais il semblerait qu’en Italie, la virgule soit moins utilisée que chez nous (et Edmée en a adopté le style). J’ai regretté également la mise en page des dialogues qui m’a un peu dérangée (mais la faute n’en revient pas à l’auteur) ainsi que les numéros de renvoi en bas de page trop petits.  Des détails quoi…

 

Edmée avait peur que les lecteurs soient déçus à force d’avoir attendu si longtemps après son livre. Peut-être avait-elle un peu raison. Nous l’attendions un peu comme un messager, prometteur d’heures intenses de lecture.  Est-ce que cela veut dire que je m’attendais à mieux ?  Oui, peut-être, mais mieux aurait été parfait, et le parfait n’existe pas.

 
Félicitations Edmée.  Nous attendons ton deuxième avec impatience J.

 


Le petit Belge, Février 2009 -
Dès les premières pages, Olivia nous explique ses relations avec sa mère : "Elle n'a jamais été capricieuse, ni vraiment égoïste. Pas proche de moi non plus, ni moi d'elle, mais sans hostilité. Un peu comme si nous étions tante et nièce, sans l'intimité qui semble parfois exister entre certaines mères et filles. Ni la froide rivalité qui existe entre d'autres (...) Elle ne m'a jamais appelée pour me dire que quelque chose de bien lui arrivait....ce n'est pas le genre de choses qu'elle partage avec moi. Nous sommes plutôt du style à nous échanger bouquins, recettes de cuisine et adresses de bons hôtels".

Aussi Olivia est intriguée par la demande insistante de sa mère de renoncer à son départ en vacances et de revenir de Turin une semaine à Bruxelles... A son arrivée en Belgique, Suzanne/Mammita (53 ans) lui annonce avec beaucoup de sérénité qu'elle est atteinte de la maladie d'Alzheimer. Elle souhaite que l'espace d'une semaine, Olivia apprenne à la connaître et lui pose toutes les questions qu'elle veut sur sa vie.

Mammita remonte quelques décennies en arrière pour raconter l'histoire de sa famille, son enfance, ses vacances en Italie, la perte de sa virginité avec Rinaldo, son mariage sans amour avec Sébastien d'Entremont-van Zwyn, le décès de son père Max, sa rencontre avec son amant Sergueï, la naissance d'Olivia. Rebondissement au treizième chapitre lorsque les révélations de Mammita touchent directement Olivia qui se rend compte des sacrifices faits par ses parents pour elle... Heureusement, la génération suivante s'affranchit des conventions et de l'hypocrisie qui régnaient dans certaines couches sociales élevées, et mène sa vie comme elle l'entend : Olivia est heureuse en Italie avec Pierluigi. Le roman se termine par l'explication du titre et une bouffée d'enthousiasme et d'optimisme, la maladie d'Alzheimer paraissant bien loin.

De ce premier roman d'Edmée De Xhavée bien écrit et agréable à lire, j'ai noté une citation à méditer que j'approuve totalement : "Le passé, c'est bon seulement quand on y retourne pour se faire plaisir, pour se dire qu'on a eu de la chance d'avoir vécu çà, ou vu çà. Mais des larmes, on a assez d'occasions d'en verser sans en plus aller les rechercher dans le passé!".

Enfin, deux petites critiques : la ponctuation incorrecte des dialogues et la quatrième de couverture qui en dit trop sur le contenu du roman. J'y aurais mis un peu de suspense en me contentant du résumé du premier chapitre : pourquoi Mammita insiste-t-elle autant pour qu'Olivia vienne passer une semaine à Bruxelles?

 

 

Martine Dillies-Snaet - 12 avril 2009 - Si j'ignore comment on retient les livres pour les prix littéraires, ce que je sais, c'est qu'ici c'est un Goncourt que je viens d'achever. Quelles richesses dans ce récit! Amour de la vie, remise en question de soi et des valeurs inculquées, sincérité, aucune tricherie ! Comme Edmée De Xhavée a signé, avec « Les Romanichels », un livre riche!


C'est le seul commentaire que j'aurais envie de faire!


Car enfin, je referme ce livre sur... trois semaines de lecture. Ma lecture est terminée. Tristesse! Bonheur! Aucune ambivalence pourtant et il est rare que je prenne autant de temps à lire 250 pages: j'avais si peu l'envie de l'achever, si peu l'envie d'abandonner les personnages qu'à chaque fois, je les laissais prendre forme. J'avais envie d'en savoir plus encore et encore plus sur chacun d'entre eux; or je savais qu'une fois le point final rencontré, ce serait fini. Et je voulais tout, sauf ça! Abandonner les personnages, quelle idée! On ne les abandonne pas quand on a la chance de connaître un tant soit peu l'auteur! Elle y est omniprésente. Mais quand même! Suzanne me manque! Et Mado, et Grand-Daddy, et Philippe, et. Sergueï, et..., et tous les autres!


Seul un chat ronronnant manque à cette atmosphère de détente. Je souris en l'écrivant, car n'ayant pas dérogé à ma sacro-sainte habitude, une fois une cinquantaine de pages lues, je suis une fois encore allée voler les mots des deux dernières pages. Et ils furent ceux que j'attendais, sans aucune surprise ni aucune déception. Que du contraire! Ils m'ont apporté la quiétude que je désirais avoir afin de pouvoir savourer tranquillement chaque réaction des personnages.


Edmée DE XHAVEE, grâce à sa sensibilité et à son style superbe, nous fait ressentir toutes les émotions vécues par les membres de deux grandes familles partagés, tiraillés entre le sens du devoir et l'appel vers « l'ailleurs ». Chacun est acteur de sa propre existence mais ce sens du devoir en est bien souvent « le maître ». On ne fait pas une croix ainsi sur toute une éducation et il faut la sagesse des années pour pouvoir faire co-exister les deux et en retirer tout l'enseignement qu'il y a à en retirer.


Une semaine à partager avec sa mère fait vivre à Olivia la saga de sa famille dont elle ignorait quasiment tout hormis les convenances. A l'opposé, Angelina, la domestique, lui fait découvrir le sens profond du mot « vie » telle que la ressentent et la subliment les Italiens et Italiennes. S'opposeront le « quant à soi » et « le plaisir du toucher », la « haute restauration » et les « petits restaurants familiaux », les rencontres de salon et celles des rues. A chaque fois, les deux extrêmes, en totale contradiction, sont aussi riches les uns que les autres. Tiraillement et dilemme de l'existence pour qui connaît ces deux mondes et qui doit « choisir »!


Enfin, au-delà de cette dualité, en filigrane jusqu'à la fin, viscérale, coule la source de vie des Rroms dont la Chakra à seize rayons est leur emblème. Mais de leur rôle dans ce livre, je n'en dirais pas davantage. Il faut leur laisser l'étrange, la croyance. Et puis s'il faut absolument lire ce qu'a écrit Edmée DE XHAVEE, ce n'est qu'à partir d'un certain âge et d'un certain vécu qu'on peut le vivre jusqu'au fond des tripes. Un peu à l'instar du film de Clint Eastwood, « Sur la route de Madison , réellement et intiment appréciable qu'à partir d'un certain...temps, d'une certaine maturité.


Merci, Edmée, de nous avoir offert tes « Romanichels »! m. 12/04/2009


Philippe Desterbecq, Juin 2009 -  Je l'ai attendu 5 semaines, ce premier roman d'Edmée De Xhavée, auteure belge habitant aux Etats-Unis, publiée par la maison d'éditions "Chloé des Lys" de Tournai.

Edmée vient de temps en temps sur mon blog. Avec Ptitsa et Béa Kimkat, c'est ma troisième rencontre littéraire grâce aux blogs. J'ai eu envie de connaitre son histoire.

C'est en fait l'histoire de 2 familles amies et de plusieurs générations. De ce fait, il y a plusieurs personnages et je dois avouer que je ne savais pas toujours bien de qui Edmée voulait parler. Les époques et les personnages se mélangent dans le récit.

J'ai toutefois bien apprécié le roman et le style d'Edmée de Xhavée. J'ai accroché dès les premières lignes, ce qui n'est pas toujours le cas.

Le récit commence par l'annonce de la maladie d'Alzheimer faite par la mère à la fille. Les 2 femmes n'ont jamais été vraiment proches et Olivia recule ses vacances pour passer du temps avec sa maman et apprendre à la connaitre.

Nous assistons alors à une longue conversation entre la mère et la fille qui va apprendre bien des secrets sur sa famille et sur sa naissance.

Je venais de lire "La belle entente" de Ptitsa qui nous parle de son arrière-grand-mère atteinte de cette maladie et "Toutes ces choses qu'on ne s'est pas dites" qui est une longue conversation entre une fille et son père quand j'ai commencé "Les Romanichels". J'y ai trouvé un mélange des deux.

Un livre plaisant, bien écrit, où on suit plusieurs générations avec intérêt sans jamais se lasser. A conseiller.

 

Bob Boutique, Juillet 2009 - Je viens de terminer « Les Romanichels ». C’est un bouquin brillant, le genre d’ouvrage qu’on cite en référence ou qu’on envoie pour l’obtention d’un prix. Car il a tout pour lui : le style, la langue, la profondeur… mais dieu qu’il est difficile à lire !

J’ai connu une amie qui passait son temps à faire des puzzles de dix mille pièces qu’elle commandait en Allemagne. Elle renversait la boite sur une table réservée pour des semaines, voir des mois, avec une délectation gourmande, puis se mettait au travail… chaque petit bout de carton à une couleur dominante et une forme qui sont autant d’indications. Alors, elle classait, rangeait, triait, regroupait, hésitait, abandonnait, reprenait…

Edmée, c’est ça. Avec au final, si vous y mettez le temps et la patience, un véritable petit chef d’œuvre. Il faut l’apprivoiser. Autant le savoir.

 

Mais commençons par le commencement.

L’objet est presque parfait. Une réalisation graphique de Jean-Pierre Ghys qui s’est faite longtemps attendre, mais dont le résultat est remarquable. Rien ne manque : une couverture très réussie, le résumé du livre, la bio de l’auteur avec la photo ad-hoc au dos, l’adresse du blog et 260 pages d’une police facile à lire avec des paragraphes bien aérés, sur papier recyclé. 20,90 euros.

***


Bon, d’accord. C’est un livre bien imprimé, brillant, un peu compliqué, mais qui raconte quoi ? Une histoire très simple.

Olivia ( la belle trentaine ) vit en Italie et s’apprête à partir en vacances avec son Pierluigi adoré et des amis, lorsque sa mère téléphone de Bruxelles et lui demande de venir la rejoindre, une semaine. Elle a des choses à lui dire… il faut savoir que ces deux là n’ont jamais été très proches ( Olivia été élevée par ses grands parents ) et font partie d’une famille bourgeoise de la région de Verviers où
‘les gens vivent côte à côte poliment’ et ne s’embarrassent pas d’émotion inutiles.

Soit, c’est quand même sa mère. Elle prend donc le premier avion, bien décidée à rejoindre les autres dès que possible. Embrassades prudentes, taxi, passage rapide à l’appartement pour y déposer les valises et enfin petit resto où sa mère lui annonce calmement :
‘J’ai la maladie d’Alzheimer… je ne suis qu’au premier stade, l’évolution peut être lente, je peux avoir de la chance, mais je l’ai’.

Du coup, elle veut lui expliquer sa vie, les pourquoi et comment…avant que la mémoire ne s’éteigne. ‘Je ne vais pas te servir un roman idéalisé ou censuré pour que tu réalises à quel point j’étais merveilleuse ! je n’ai pas été une bonne mère, ni une bonne fille, ni une bonne épouse… et pourtant, je sais être très bonne.’

Alors, elles vont parler, parler, parler et encore parler, pendant 260 pages et toute la famille va y passer, en remontant quatre générations, car tout à un début, tout s’imbrique dans tout, rien ne se développe sans raison et que la vie est en fin de compte un grand puzzle de dix mille pièces dont chacun ne détient qu’ une partie.

Voilà l’histoire. On aura même droit à une surprise de taille au dernier chapitre. Puis à une fin toute en émotion, lorsque mère et fille se dénouent enfin :
‘je me jette dans ses bras, elle répond à mon étreinte, nous rions, extrêmement réjouies. Demain est un autre jour… Demain est le premier jour de notre nouvelle vie.’

***


Bon, on a compris, mais entre nous…c’est pas un peu assommant cette semaine de conversations ?

Pas du tout. Car Edmée De Xhavée a l’art de nous faire vivre toutes ces situations comme si nous y étions, mêmes celles du début du siècle qu’elle décrit avec une justesse qui laisse pantois. Dans une société aisée où on parle beaucoup de dot, de situation et très peu d’amour et encore moins de passion, un mot qui sonne presque comme ‘dépravation’.

Une société de bourges où on vit avec des domestiques, où les femmes ne travaillent pas, n’allaitent pas et surtout ne divorcent jamais. Où les petites filles prennent leur bain au pensionnat revêtues d’une longue tunique et où il faut toujours être vues à trois pour ne pas éveiller les soupçons. Un monde, où les jeunes femmes se posaient beaucoup de questions lorsqu’elles découvraient au cinéma la Marquise des Anges qui poussait des cris enchantés lorsqu’on lui faisait l’amour. Alors qu’elles… ‘avaient bien aimé *avant*, attendus que *pendant* se passe, pour de nouveau aimer *après* !’

Impossible de tout résumer. Le bouquin fourmille de ces petites révélations qui font la vraie histoire de l’humanité et surtout dans ce cas-ci, de la femme. Car c’est avant tout un livre sur la condition de la femme et l’évolution souvent difficile de celle-ci au cours du XXième siècle.

Au fond, quand on lit attentivement, on se rend compte que seules les femmes qui ont osé braver les interdits et quitter leurs familles ( voir leurs enfants ) pour courir le monde comme des romanichels, ont réussi à trouver un peu de bonheur, un peu d’amour et beaucoup de passion ! D’où le titre.

***


Le seul problème, bien réel, dans ce livre , c’est qu’il faut tenir une liste détaillée des très nombreux figurants qui traversent le film. Car les noms, prénoms, surnoms, âges, lieux et époques s’entrechoquent.

Edmée de Xhavée est une écrivaine à tiroirs, qui saute d’un sujet à l’autre, d’une époque à l’autre, d’un personnage à l’autre… au gré des longs échanges au cours desquels la mère et la fille finissent par parler de tout et de tout le monde, à force d’accumuler les détails et les coq à l’âne.

L’auteur en est consciente puisqu’elle nous propose un arbre généalogique à l’entame de son livre. Mais autant vous prévenir. Il est tout à fait insuffisant pour la compréhension et je vous conseille vivement d’en fabriquer un autre que vous complèterez au fur et à mesure de votre lecture.

***


C’est le premier roman de Edmée de Xhavée, mais elle nous a déjà proposé plusieurs nouvelles et de nombreux textes dont le moins qu’on puisse dire est qu’ils sont merveilleusement bien écrits. Si j’osais, je comparerais volontiers son style à celui de Marie Gevers. Un vocabulaire d’une richesse rare et un talent de la description, et spatiale et psychologique, qui sidère.

Cette bonne femme voit tout, note tout, range tout comme une entomologiste et n’oublie rien. Une seule façon de traiter avec elle : rester nature, avec vos qualités et défauts. N’essayez pas de tricher, elle le verrait immédiatement. Quelques exemples quand même :

‘Il a la bonne soixantaine, un peu lourd mais robuste, plutôt chauve, et s’habille de la seule façon qui lui convienne : un style anglais décontracté, pantalons de velours, pulls shetland ou irlandais, chaussures de cuir à semelle gomme ou crêpe. Il n’est pas beau, mais c’est un bel homme, qui certainement a trouvé son âge idéal dans la maturité. Jeune il devait être moche et anodin. La seule chose excitante à son sujet, c’est qu’il était vétérinaire.’

Et puis ces quelques perles…

‘Belladonna, la grosse chatte, saute de son fauteuil pour venir me voir, bâille et s’élance dans la cuisine, frottant ses flancs rebondis sur le chambranle de la porte, la queue orgueilleusement levée et ondulante.’

‘Le château, délaissé pendant des années, coûtait trop cher. La toiture était à refaire, ainsi que tout le pan de mur nord. Les caves prenaient l’eau, les mosaïques de la terrasse étaient déchaussées, l’étang sentait l’eau croupie et ses berges s’effondraient, la vigne vierge avait mis de l’humidité dans les murs de tout le premier étage de la tourelle et condamné une des fenêtres, la tuyauterie donnait des signes de faiblesse.’

***


J’ai mis un mois à lire « Les romanichels ». En général une semaine me suffit. J’ai beaucoup aimé, adoré et ajouterai même ( mais là à titre purement personnel ) que c’est un des bouquins les plus accomplis découverts à ce jour chez CDL. Mais dieu, qu’il est difficile à lire.

 


L'adorable Mimi du Sud a donné son avis sur son blog...

Fauvette, Janvier 2010 - 

Mais j'ai le plaisir de te dire que j'ai fini ton livre. Honnêtement, j'ai adoré ! Quelles vies, si différentes sur certains points mais aussi si semblables sur d'autres... (…) ! Quel déchirement ! Tout ça pour la bienveillance et les "qu'en dira-t-on ?"... Je dois être un peu rebelle, je m'en rends compte...je déteste les rituels, les obligations parce qu'on a toujours fait comme ça et qu'on n'a jamais vu faire autrement....A bas les visières et les idées toute faites !


Un livre superbe à lire, qui vous emmène en voyage, au travers de vies si bien contées ! Et pourtant, à voir la couverture, je n'étais pas tentée...comme quoi il faut passer au-dessus pour pouvoir profiter de ce si bel écrit ! A quand ton nouveau roman ? Je suis vraiment impatiente de pouvoir à nouveau te lire !

 

Carine-Laure Desguin, Janvier 2010 -

Que répondre à cette question ?
Les aînées ont bien sûr raison !
Oui j'aimerais te suivre
J'aime bien moi lire ton livre !

Demande-moi lequel ?
Heuuu "les Romanichels" !
C'est gai et page après page
ça glisse et ça déménage
Une très belle histoire de famille
Les sentiments se déshabillent
Les châteaux se désargentent
On s'enchante et se désenchante
Et de Verviers vers l'Italie


Kate Milie, Janvier 2010 -
Je me souviens avoir reçu les romanichels après 1 mois d'attente (rupture de stock chère Edmée). Je n'avais pas le temps de lire ce jour-là... Je me suis quand même dit "une p'tite page quand même"... Gloups... Les 20 premières pages ont été dévorées en quelques minutes ;-)et les jours suivant, il en fut de même avec les 200 autres :-) J'ai adoré ton style de dentellière, les descriptions soignées, le petit ton primesautier, la joyeuse prise de distance face aux conventions et la lourdeur sociale qui ont fait tant de ravages (il n'y a pas si longtemps...).

 

Nadine Groenecke, Juillet 2010 -

L'histoire débute avec Olivia qui habite en Italie. Elevée par sa grand-mère, dans un milieu bourgeois, elle n'a jamais été proche de sa mère et pourtant, lorsque celle-ci lui demande de la rejoindre à Bruxelles, elle n'hésite pas à sacrifier ses vacances dans l'île de Brioni, pressentant que cette requête cache autre chose que de simples retrouvailles. Elle a vu juste. Suzanne, sa mère, va en effet lui apprendre qu'elle est atteinte de la maladie d'Alzheimer. Elle veut, tant qu'il est encore temps, évoquer son passé et celui de ses ancêtres avec sa fille. Durant une semaine, Olivia va donc écouter "Mammita" ressusciter les membres de sa famille et les proches qui les ont accompagnés, l'occasion pour elle de se pencher sur sa propre vie.

Le livre d'Edmée, c'est une fresque familiale, une farandole de personnages bigarrés qui évoluent dans une traversée des générations et qui surgissent au fil des pages comme un envol de papillons multicolores. Ils se croisent, s'aiment, se détestent, s'ignorent, se supportent... et, comme dans toute famille, ils portent des surnoms qui les rendent d'autant plus attachants.

Dans un style riche et raffiné et basculant allègrement de l'humour au tragique, Edmée raconte avec brio les émotions et les sentiments qui s'entrechoquent dans ce milieu "bien comme il faut" pétri de conventions.

Vous l'aurez compris, j'ai passé un excellent moment en compagnie des nombreux personnages du livre de l'auteur. Ce roman, j'en ai savouré chacune de ses pages, comme on se délecte d'un caramel fondant ou d'un bonbon à la violette. J'ai aimé le délicat parfum d'antan qui en émane et qui crée une atmosphère particulière. Et j'ai apprécié le dénouement inattendu. Mais, chut... Je laisse les futurs lecteurs le découvrir.

,
Christine Brunet, Août 2010 -

 

Premières pages... L'histoire ne commence pas dans l'allégresse mais avec une mauvaise nouvelle qui rapproche lentement mais inexorablement mère et fille en les projetant dans le temps.

 

Un résumé? Non... je ne vous en dirai pas plus ! L'histoire se découvre mais ne se résume pas...

 

Je me laisse aller, fais connaissance avec quelques personnages... Et, peu à peu, sans y prendre garde, je ne veux plus entendre parler du présent des héros... Je veux découvrir leur passé... une histoire de vieilles dentelles... sans arsenic mais pavée de conventions dans un monde figé dans le paraître... une histoire de gens englués dans la bienséance, qui souffrent et font souffrir dans le carcan imposé, sous le regard acéré et moralisateur de leur communauté.

 

Mais on les aime, ces personnages qui se débattent sous le ciel gris... parce que, parfois, ils s'échappent. On les suit alors avec soulagement sous le soleil italien ou provençal. On applaudit à leurs résurrections, à leurs coups de pieds dans les convenances, à leurs libertés grappillées ou gagnées de haute lutte. Puis on grince des dents aux retours de bâton.

 

Un joli style qui amène sans effort à mes narines provençales les effluves piquantes du thym et du romarin à peine cueillis et qui accompagne avec délicatesse les personnages dans leurs joies, leurs doutes et leurs désillusions.

 

Vrai, j'attends avec impatience ton prochain livre, Edmée...

 

Josy Malet-Praud, Août 2010 -

 

L’été…J’aspirais à voyager, je rêvais d’un dépaysement, j’avais besoin d’un bon roman… Les Romanichels   attendaient  ce moment propice.  

 Une jolie couverture aux couleurs -terre et feu-  et 260 pages pour une croisière sur trois générations. Des escales  en Belgique, dans le sud de la France, sans oublier l’Italie, Torino en particulier.  Un beau voyage avec trois familles, pour une histoire émouvante à plus d’un titre.

Les romanichels s’inscrivent dans la lignée des fresques familiales où les personnages s’animent en 3D sous les yeux du lecteur : un univers tout en relief.

            Les secrets de famille auraient pu dormir pour l’éternité si la maladie d’Alzheimer n’avait brandi son épée de Damoclès sur la tête de Suzanne. Elle est la mère d’Olivia, devenue femme. Mère et fille se connaissent en surface, Olivia ayant été élevée par sa grand-mère sans vraiment savoir pourquoi. 

            Si l’annonce de la maladie fait figure de menace, elle sera aussi pour Suzanne l’occasion de lever le voile sur un secret à la portée fondamentale, avant qu’il ne disparaisse, englouti par  les trous noirs de la mémoire. Un secret conséquent, bien gardé par le clan familial, injuste pour la mère comme pour sa fille qui ne peut avoir eu jusque là qu’une vision parcellaire de la femme que fut sa maman. Un secret offert en héritage avant qu’il ne soit trop tard…

            Un voyage aussi au cœur de deux familles dont les équilibres et les relations sont soumis aux épreuves du temps, aux convenances, aux carcans éducatifs, aux rêves et aux désillusions... Les destins s’entrelacent ou s’éloignent, tantôt soudés par l’amour, la tendresse ou les obligations, tantôt dispersés par les aléas de l’existence, les contingences sociales et les rancœurs. Un récit où conventions et conformismes, soumissions et rébellions conduisent  en cadence l’évolution du roman.

 

Il faut du souffle, de l’endurance  et une maîtrise certaine pour mettre au monde un tel roman. L’entreprise, périlleuse, compliquée, ne pouvait être portée que par un auteur de talent. Une écrivaine.

Dans Les Romanichels, Edmée De Xhavée ne se contente pas d’écrire. Elle compose une partition complexe, elle dessine des tableaux animés, elle sculpte les émotions et les sentiments, elle parfume les ambiances et les lieux. Elle imprime sa marque par un  style élégant, limpide et dense, ouvragé comme une pièce de dentelle de luxe quand les circonstances s’y prêtent. Une écriture qui éprouve les cinq sens pour le plus grand bonheur du lecteur.  Présent et passé, narration et dialogues s’associent sans rupture et sans discordance préjudiciables à la visibilité du lecteur ou susceptibles de rompre l’enchantement.

J’ai tourné la dernière page comme on ferme la porte sur un univers familier. L’esprit réquisitionné par les souvenirs et le plaisir, le cœur encerclé par la nostalgie. Pour ne pas quitter les Romanichels trop vite, j’ai relu les premières pages, puis les nombreux extraits signalés par un post it en cours de lecture ;  et j’ai résumé pour moi-même ce que j’expose plus largement ici : « Bon sang ! Quel beau roman… ».

 

Josy Malet-Praud@Août 2010 / www.lascavia.com

 

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